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LE PHÉNIX

  
Quand elle me quitta, le cœur plein de dégoûts,
Je jurai — renonçant à l’amour sur la terre —
Que des couples heureux je ne serais jaloux,
Et que je marcherais résigné, solitaire…
 
La moiteur des baisers aux lèvres des époux,
Les timides aveux, le ravissant mystère
Des regards échangés aux premiers rendez-vous,
Ont rallumé pourtant dans mon âme un cratère.

L’on ne s’isole pas à vingt ans, quand les fleurs
Aux rayons printaniers avivent leurs couleurs,
Exhalant des parfums qui grisent les pensées…
 
Quand les nids désertés se peuplent de nouveau,
Quand jusqu’au mort blotti dans le froid du caveau
Tressaille au souvenir des tendresses passées…