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LES FUSILLÉS DE MALINES

Le vent chasse les cendres vers les murs du cimetière, où s’étalent encore impudemment les affiches proclamant la levée et les inscriptions de milice.

— Par ici les hommes ! s’écrie le Blanc. Voici bien d’un autre jeu.

De leurs doigts crispés, les tâcherons se mettent en devoir d’arracher l’amphigourique et melliflue proclamation, mais usés, émoussés par les rudes labeurs, les ongles ne parviennent pas à entamer le papier. Dans leur rage impuissante, ils couvrent l’imprimé d’une grêle de crachats.

— Un instant, garçons, laissez-moi faire. Nous allons rire !

C’est de nouveau Rik Schalenberg.

— Place à notre Rik ! Hourrah pour le Schalk !

Vraiment l’Espiègle n’est jamais à court d’inventions cocasses. Il n’aurait qu’à montrer le bout de son nez frisé et mobile comme celui d’un lapin, pour mettre en gaieté l’assemblée la plus morose. Avant qu’il ait ouvert la bouche, sa seule contenance, le retroussis de ses lèvres, le pétillement de ses yeux déchaîne une bordée