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eurent leurs coudées franches. Toutes les rigueurs étaient réservées aux seuls bonzes qui s’ameutaient contre l’autorité du régent. Quelques couvents bouddhistes furent même rasés par son ordre et firent place à des églises catholiques. En 1582, on n’en comptait déjà pas moins de deux cents, et le nombre des Japonais convertis se montait à plus de cent cinquante mille.

Mais, hélas ! ces progrès n’avaient pas été seulement amenés par la persuasion. Quelques grands daïmios, attribuant à l’introduction du Christianisme la prospérité inouïe qui se manifestait dans leur province avec la libre circulation des étrangers, l’avaient non seulement embrassé pour leur compte, mais l’imposaient encore à leurs vassaux, comme une obligation absolue. Les prêtres bouddhistes furent traqués, mis à mort, et leurs monastères devinrent la proie des flammes. On vit même toute la population de certains districts, forcée d’opter entre leur conversion immédiate et l’exil suivi de confiscation. D’autre part, les richesses acquises par les daïmios convertis, les rendaient peu à peu redoutables au gouvernement, en sorte que Hidéyoshi, aide de camp et successeur de Nobounaga, prit soudain ombrage de la nouvelle religion et s’entendit avec le célèbre Iyéyas pour l’étouffer au berceau.

Jusqu’alors les Mikados, fils des dieux, avaient été la seule autorité souveraine reconnue par la nation. Or, par l’introduction du Christianisme, ce pouvoir absolu, passé dans les croyances à l’état de dogme, venait se heurter imprudemment à la puissance spirituelle du