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gan, et fait taire la poésie des hommes. Ce n’est d’ailleurs qu’un moment ; ayez foi et courage, Monsieur. »

Oui ! foi et courage !

Foi et courage, m’ont dit MM.Alex. Dumas, E. de Girardin, Eug. Sue, Aug. Vacquerie.

J’aurai foi et courage.

Pauvre et humble artiste, je continuerai mon oeuvre solitaire, calme, grave et serein. Rempli de sublime et sainte folie de l’art, je travaillerai comme les vieux maîtres allemands ou italiens du moyen âge, sans me laisser troubler par les bruits du dehors et les rumeurs de la place publique. Je laisserai rire les hommes qui n’ont point de cœur, et je marcherai toujours en avant, sans colère et sans haine, la flamme au cœur, la harpe en bandoulière et les yeux sur l’horizon où resplendit, calme et éternel comme Dieu, le vaste et splendide soleil de l’art. Si sur ma route quelque main sympathique m’est tendue, si quelque voix de frère me dit : Courage ! je serai heureux et je la bénirai !

— Encore un mot.

Quelques-unes des pièces de ce recueil respirent une exaltation républicaine qui effarouchera peut-être quelques esprits timorés et incertains.

On ne sait pas en France ce que c’est que la servitude. Il faut avoir vu les misérables paysans des campagnes bavaroises grelotter sous leurs huttes de chaume et de neige ; il faut avoir vu le gendre d’un prince royal de Bavière frapper ses paysans pour oser dire à tous que la République est la religion de Dieu. Mon cœur s’est serré, des larmes ardentes m’ont brûlé la paupière, la fibre d’une généreuse colère s’est