Page:Elder - Le Peuple de la mer.djvu/101

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Pilier, le marais, la jetée, le port… Et l’on était surpris, quand on baignait dans ces nuages qui dérivaient hâtivement, de s’apercevoir qu’aucune brise ne les poussait.

Maintenant le village était blotti dans la crainte. La vie s’était tue ; l’air avait perdu sa sonorité, les choses leur écho. On se cherchait d’une maison à l’autre, on se hélait en appels étouffés et la jetée ne retentissait point du soufflet des sabots. N’était la voix de la cloche, on pouvait croire que le brouillard avait effacé l’humanité sur cette pointe de terre.

Pourtant, à l’extrémité de la digue, des femmes demeuraient groupées. La cloche tintait au-dessus de leur tête dans son bâtis en forme de guillotine, sous la main de la Gaude qui l’agitait par intervalle. Sur son mât, le petit feu vert allumé par Zacharie s’efforçait de trouer la brume. À peine si la mer apparaissait aux pieds de la jetée qui avait pris des proportions de rempart, et d’en haut les femmes penchées distinguaient mal une surface d’étain sur laquelle se traînaient en adhérant des vapeurs floches.

Le brouillard sentait l’âcre et déposait de l’humidité. La corde de la cloche était raide et ne balançait pas quand on la lâchait. Les femmes avaient un foulard sur la tête ; il ne faisait pas un temps à sortir une coiffe.