Page:Elder - Le Peuple de la mer.djvu/112

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yeux fous, la bouche grande ouverte sans proférer un son, oscille un moment et s’abat raide.

On la relève évanouie, le front fendu sur une pierre et tout sanglant. Des femmes s’essuient les paupières et se détournent par émotion. On est parti chercher des civières pour ramener les cadavres d’Urbain Coët et d’un matelot. On n’a pas retrouvé les corps de l’autre et de Léon.

Les pêcheurs ne s’expliquent pas le naufrage. Le sloop porte à l’étrave une bosse rompue. Perchais seul fait des hypothèses, dit que, sans doute, le câble de mouillage ayant manqué pendant le sommeil des hommes, la barque a dérivé vers la côte, mais voyant le père Olichon qui le regarde obstinément de toute sa face d’honnête homme, il conclut :

— Et puis Coët était trop fier, c’est l’bon Dieu qui l’a puni.

Dans le groupe quelqu’un murmure :

— Et qu’tu l’as p’tête ben aidé…

Tout le monde se retourne vers la voix. Comme s’il n’avait point entendu, Perchais s’éloigne, la tête haute, le dos carré.

Ce fut Louchon, le facteur, qui porta la nouvelle aux Goustan à Noirmoutier et au vieux Couillaud.

Le bonhomme se redressa sur son carré de pommes de terre pour écouter la chose, un bras appuyé à la houe luisante. Les plis de son visage se creusaient durement à mesure du récit, et quand