Page:Elder - Le Peuple de la mer.djvu/118

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lice, le menton dans les paumes et toisant obstinément l’île dont la haute muraille, plaquée de lichens fauves, dominait le sloop. Il avançait à peine, abrité du vent ; il glissait imperceptiblement, sans friser l’eau si limpide qu’on voyait les dessous de la coque, aplatis par la réfraction. Un matelot lança une amarre que Charrier goba au vol et le Martroger accosta.

Piron ne se tenait pas de joie et gambadait comme un jeune chien.

— Ah ben ! c’en est d’une surprise !

— Donne-nous donc la main à débarquer au lieu de japper ! cria la jeune femme en montrant ses dents saines dans un rire satisfait.

Gaud paraissait plus maigre qu’autrefois encore. Le maxillaire, les pommettes, les arcades sourcilières tendaient sa peau et on le sentait blêmi sous le hâle. À l’Herbaudière, la mère Izacar prétendait que le sang lui tournait en eau, mais les hommes disaient qu’il était vidé comme une outre, en désignant la Gaude du coin de l’œil.

À la vérité, Gaud crachait le sang depuis que Double Nerf lui avait défoncé les côtes. Ça le brûlait dans le coffre quand il toussait, et il n’avait plus de goût qu’à se croiser les bras et dormir. Il avait dû débarquer du Secours de ma vie, et sa femme, à force de démarches, — on chuchotait : à