Page:Elder - Le Peuple de la mer.djvu/227

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formes ; des trois-mâts lançaient au ciel leurs silhouettes téméraires ; des vedettes astiquées circulaient en clignotant de leurs cuivres ; des barques croisaient ; et dans le courant, les grosses bouées coniques, empanachées de feux verts ou rouges, accomplissaient avec lenteur des demi-tours en se balançant ainsi que des matrones à la baignade.

P’tit Pierre s’émerveillait. Jamais il n’avait vu de port aussi vaste, ni tant de bateaux de toutes les formes et de toutes les tailles. Des bâtiments charbonneux, larges comme des cathédrales, la mâture écourtée et des ancres de deux tonnes pendues à l’écubier ; des paquebots à étages, sommés de cheminées comme des tours ; des longs-courriers galeux qui sentent les épices ; des bijoux de yachts, voilés de soie crème ; des barques multicolores, des remorqueurs pansus, et des torpilleurs de l’État, grisâtres, menus, dont les flammes traînent de la pomme du mât jusqu’au pont.

La variété des pavillons surtout l’étonna. Il avait bien appris, à l’école, le nom des peuples partagés sur le globe, mais il n’imaginait rien au delà de l’Herbaudière. Cette fois il crut voir les nations, dans l’étamine superbe aux tons violents, et il sentit autour de lui la terre immense et merveilleuse.

Des accords de musique soufflaient, par bouffées,