Page:Elder - Le Peuple de la mer.djvu/237

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

des barques muettes et, sur le quai, une ligne de matelots ivres qui s’égosillaient en s’étayant pour avancer.

— Ben quoi, mousse ! La gueule de bois !

Julien Perchais grimaçait amicalement en passant sa main paralysée dans sa toison rousse. Ici et là des hommes sortaient des barques, observaient le ciel et marchaient sur les ponts. Le jour filtrait sous des nuages bas, ourlés, à l’est, de mauve très fin. Les choses avaient de la couleur dans la lumière sans éclat ; l’air était neuf.

La ville dormait. Les pavillons tombaient le long des drisses ; des fonds de lanternes brûlées pendaient aux guirlandes ; une tribune était ridicule dans la sérénité du matin. Au delà des écluses, un fouillis de mâture vernis brillait doucement. Un vapeur siffla et son cri traîna longtemps comme une écharpe. Puis une sonnerie vibra, métallique, impressionnante dans le calme, et le drapeau français parut en haut d’un mât.

P’tit Pierre songea soudain à Florent qu’il avait perdu dans la nuit et se mit à rire, sans savoir pourquoi ; puis il cassa la croûte avec les hommes et avala deux verres de vin.

— On va mettre à la voile, les enfants !

Le Laissez-les dire appareilla et sortit lentement de l’avant-port jusqu’au moment où il tomba