Page:Elder - Le Peuple de la mer.djvu/266

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La mère l’avait traité de : « fils ingrat » en faisant mine de le chasser ; Bernard l’excusait au fond, tout en protestant pour sa bonne femme ; seul P’tit Pierre l’approuvait et l’enviait au souvenir de la journée de Saint-Nazaire, toute remplie de soleil, de joutes, de régates, où la mer était couverte de navires formidables.

Sans négliger l’atelier, P’tit Pierre naviguait maintenant le soir et le dimanche avec Cul-Cassé dont il était devenu le grand ami. Pas de régates dans la baie où il n’assistât ; pas de nouvelle barque au port qu’il n’accourût voir ; et si l’on avait besoin d’un coup de main sur un sloop, il était toujours là, les bras offerts.

Exact à la maison, aux heures des repas, il ne s’y attardait point, malgré les prévenances. Il disait, sans humeur, par plaisanterie, « qu’il n’était plus d’âge à rester dans les jupes » ; et Bernard clignait de l’œil d’un air entendu en déclarant :

— Ah dame ! c’est la jeunesse !

Il savait que P’tit Pierre commençait à reluquer les jolies filles qui sortent des usines à midi et à six heures en cotillon court avec une pèlerine de laine sur les épaules. Clovis les attirait à l’atelier en roucoulant des romances ou en cornant, en voix de tête, des chansons vendéennes bien salées, qu’elles écoutaient sans gêne, avec du rire plein les yeux. Et puis l’on descendait au port en