Page:Elder - Le Peuple de la mer.djvu/306

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Et la vieille essaie à son tour, frotte ses lunettes, ses paupières, froisse le papier où deux gouttes tombent et font deux petites bosses, puis en désespoir le remet sur la table. À quoi bon puisqu’ils savent !

C’est la Cécile qui lit la lettre, le soir à la chandelle, et pousse un grand cri :

— Ah ! ah ! ah ! il est parti ! parti ! parti !

Les vieux sont presque agacés par cette explosion douloureuse dans leur muet accablement. La fille sanglote, éperdue, en jetant au travers de ses hoquets :

— Il reviendra pus… il s’est embarqué… P’tit Pierre ! j’ le r’verrai pus… il est parti, sur un navire… Oh ! là là… pus jamais…

La mère Bernard pousse un gros soupir et son homme baisse la tête. Ce dernier coup ne les étourdit pas davantage. La Cécile à genoux, le front dans le tablier de la bonne femme, continue à gémir par intervalle dans le silence où l’on entend le vent d’automne secouer la porte au passage.

La chandelle se consume en crépitant, déplace des reflets sur la pipe, le maillot, la photographie et le sac où, par moment, ces deux mots brillent : Honneur - Patrie. Très tard, la Cécile s’en va, comme une enfant perdue dans la nuit.

Le bruit des sabots sur la route réveille le lende-