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dassent avec votre visage et votre taille, c’est-à-dire qu’elles fussent toujours dignes de la plus noble musique.

— C’est un compliment autant qu’une correction. Je vous en remercie. Mais, maintenant, à mon tour de vous corriger, j’en suis fière : vous n’avez pas compris ma plaisanterie.

— On peut comprendre la plaisanterie sans l’aimer, répondit le terrible Klesmer ; cependant ne croyez pas que je sois insensible à l’esprit et à l’humour.

— Je suis heureuse de le savoir, dit-elle avec une intention sarcastique que Klesmer n’eut pas l’air d’apercevoir.

— Dites-moi donc, je vous prie, quel est cet individu auprès de la porte du salon de jeu ? Et elle désigna l’étranger avec lequel elle avait vu causer Klesmer. — C’est un de vos amis, je crois.

— Non ; c’est un amateur que j’ai vu à Londres ; un M. Lush, un peu trop fanatique de Meyerbeer et de Scribe, ainsi que de toute la mécanique dramatique.

— Merci ! Je voudrais bien savoir si vous pensez que sa figure et sa taille sont aussi dignes de la plus noble musique ?

Klesmer, se sentant battu avec ses propres armes, lui répondit par un charmant sourire et la reconduisit auprès de sa mère.

Quelques minutes plus tard, toutes ses nouvelles suppositions sur Grandcourt et son indifférence étaient renversées encore une fois. Elle se retournait pour causer à sa mère, lorsqu’en reprenant sa première posture, elle le vit devant elle.

— Êtes-vous fatiguée de danser, miss Harleth ? commença-t-il avec son expression traînante et son calme imperturbable.

— Pas le moins du monde.

— Me ferez-vous l’honneur de m’accorder le premier quadrille ou un des suivants ?