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Page:Eliot - La Conversion de Jeanne.djvu/205

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LA CONVERSION DE JEANNE

en me parlant, vous vous adressez à un pécheur comme vous, qui a besoin de secours comme vous en avez besoin.

— Et vous l’avez trouvé ?

— Oui, et je crois que vous le trouverez aussi.

— Je voudrais être bonne et faire ce qui est bien ! s’écria Jeanne ; mais vraiment, vraiment, mon sort a été bien pénible. J’aimais tendrement mon mari et j’avais le désir de le rendre heureux, je ne désirais rien de plus. Mais il commença à se fâcher contre moi pour les plus petites choses, et…, je ne veux pas l’accuser…, mais il se mit à boire et devint de plus en plus dur, puis très cruel, et il me battit. Cela me brisa le cœur. Cela me rendait presque folle de penser que notre amour en était venu là… ; je ne pouvais le supporter. Je n’avais jamais eu l’habitude de boire autre chose que de l’eau. Je haïssais le vin et les spiritueux, parce que Robert en buvait tant ; mais, un jour que j’étais désespérée et que le vin était sur la table, soudain — je puis à peine me rappeler comment j’en vins à le faire — je versai du vin dans un grand verre et je le bus. Ce vin émoussa mes sentiments et me rendit plus indifférente. Après cela la tentation vint toujours, et de plus en plus forte. J’étais honteuse et je me haïssais ; je ne voulais plus le faire, et je le faisais. Il semblait qu’il y avait en moi un démon qui me poussait malgré moi. Et je pensais que Dieu était cruel, car, s’il ne m’avait pas envoyé