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Page:Eliot - La Conversion de Jeanne.djvu/275

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LA CONVERSION DE JEANNE

Jeanne ; il sembla la dominer avec cette force des parfums puissants qui inondent nos sens avant que nous nous en soyons aperçus. Sa main était sur le flacon ; pâle et excitée, elle le tirait de sa place, quand, par un mouvement énergique, elle le lança par terre, où il se brisa, remplissant la chambre de son odeur. Sans s’arrêter pour fermer le bureau, Jeanne se précipita hors de la chambre, saisit son chapeau et son manteau qui étaient restés dans la salle à manger, et sortit à la hâte.

Où irait-elle ? En quel lieu ce démon qui était rentré en elle serait-il de nouveau conjuré ? Elle marcha rapidement le long de la rue dans la direction de l’église. Elle est bientôt à la porte du cimetière ; elle marche à travers les tombes vers une place qu’elle connaît, une place où le sol a été remué il n’y a pas longtemps, où l’on érigera avant peu une pierre tumulaire : c’est très près du mur de l’église, du côté qui reçoit une ombre vigoureuse, abrité des rayons du soleil couchant par une clôture élevée.

Jeanne s’assit par terre. C’était un endroit obscur. Une haie épaisse, surmontée par des ormes, était en face d’elle ; une clôture de chaque côté. Mais elle désirait même ne pas voir ces objets. Son voile de crêpe était baissé : elle ferma les yeux et les pressa de sa main. Elle voulait rappeler la vision du passé, chasser le démon de son âme par les souvenirs cuisants de ses ancien-