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Page:Eliot - La Conversion de Jeanne.djvu/57

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LA CONVERSION DE JEANNE

naient cet air comprimé qui est le signe d’une lutte pour dominer le dragon, et que son teint pâle faisait naître l’idée d’une santé délicate, le visage de M. Tryan au repos était celui d’un blond ordinaire sans favoris, et il semblait difficile d’attribuer l’air de distinction qu’on lui accordait à autre chose qu’à ses mains délicates et à son pied petit et cambré.

C’était une étrangeté pour les gens de Milby qu’un ministre évangélique qui prenait le thé avec des boutiquiers et se liait avec des femmes aussi vulgaires que les Linnet, eût autant l’air d’un gentleman et ressemblât si peu au boiteux M. Stickney de Salem, dont les croyances avaient tant d’analogie avec les siennes. Et ce manque de correspondance entre le physique et les croyances n’avait pas excité moins de surprise à Laxeter, ville plus importante, où M. Tryan avait été pasteur précédemment ; car, des deux autres ministres de la Basse Église du voisinage, l’un était un habitant du pays de Galles, à la figure boursouflée et au teint graisseux, et l’autre, un personnage atrabilaire, avec des cheveux noirs pendants et une cravate énorme et mal nouée : de véritables spécimens de ce que devaient être des hommes qui distribuaient les publications de la Société des traités religieux et introduisaient dans l’Église des hymnes de dissidents.

M. Tryan serra la main des dames Linnet,