Page:Eliot - Middlemarch, volume 1.djvu/125

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— Je ne puis comprendre pourquoi les frères se rendraient plus désagréables que les sœurs.

— Je ne me rends pas désagréable ; c’est vous qui me trouvez ainsi. Désagréable est le mot qui exprime vos sentiments et non pas ma conduite.

— Je trouve qu’il exprime l’odeur de la côtelette grillée ?

— Point du tout. Il exprime dans votre petit nez une sensation associée à certaines idées affectées qui sont devenues classiques au pensionnat de mistress Lemon. Voyez ma mère : elle ne trouve à redire à rien, excepté à ce qu’elle fait elle-même. Elle est, pour moi, le type de la femme agréable.

— Que Dieu vous bénisse tous deux, mes enfants, et ne vous disputez plus, dit mistress Vincy avec une cordialité toute maternelle. Voyons, Fred, parlez-nous donc de ce nouveau médecin ; votre oncle en est-il satisfait ?

— Mais assez satisfait, à ce que je crois… Il fait à Lydgate toutes sortes de questions, puis il scrute attentivement sa physionomie tout en écoutant ses réponses, comme si elles lui pinçaient les doigts de pied. C’est sa manière… Ah ! voici ma côtelette.

— Mais pourquoi êtes-vous resté dehors si tard, mon cher enfant ? Vous aviez dit que vous n’alliez que chez votre oncle.

— Oh ! j’ai dîné chez Plymdale. On a fait un whist, Lydgate y était aussi.

— Et que pensez-vous de lui ? Il doit être tout à fait gentleman ; on le dit d’une très bonne famille, apparenté au meilleur monde du comté.

— Oui, répondit Fred. Il y avait chez John un Lydgate qui dépensait sans y regarder des sommes folles. J’ai découvert qu’il était son petit-cousin. Mais les hommes riches ont souvent pour petits cousins de bien pauvres diables.

— Cela fait toujours une différence, cependant, d’être