Page:Eliot - Middlemarch, volume 1.djvu/388

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jeune fille n’est que sa nièce, et très fière avec cela ; et mon frère lui a toujours payé ses gages.

— Une fille sensée, malgré tout, à mon avis, dit M. Trumbull en achevant sa bière et en se relevant avec un geste énergique pour tirer son gilet. Je l’ai observée pendant qu’elle préparait une médecine avec des gouttes. Elle fait attention à ce qu’elle fait, monsieur. C’est un grand point chez une femme, et un grand point pour notre ami, là-haut, pauvre chère âme ! Un homme dont la vie est de quelque importance doit considérer sa femme comme une garde pour lui ; c’est ce que je ferais si je me mariais ; et je crois avoir vécu seul assez longtemps pour ne pas me tromper sur ce point. Il y a des hommes qui sont forcés de se marier pour élever leur situation. Mais, quand j’en viendrai là, moi, il fera beau le voir. On pourra regarder et me le dire. Je vous souhaite le bonjour, mistress Waule ; bonjour, monsieur Salomon. Je souhaite que nous nous revoyions sous des auspices moins mélancoliques.

Quand M. Trumbull se fut retiré avec un salut élégant, Salomon se pencha vers sa sœur :

— Vous pouvez tenir pour certain, Jane, que mon frère a laissé une grosse somme à cette fille.

— Tout le monde le croirait, à entendre parler M. Trumbull, dit Jane. Puis, après une pause elle reprit : — Comme si on ne pouvait pas se confier à mes filles pour verser des gouttes !

— Les commissaires-priseurs ont la parole vive, dit Salomon. Ce n’est pas pour dire que Trumbull n’ait pas fait sa fortune.