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et Dorothée cessa de le trouver désagréable du moment qu’il se montra tout à fait sérieux ; car il était déjà entré avec beaucoup de sens pratique dans les idées de Lovegood, et il se montrait délicieusement docile. Elle proposa de bâtir deux nouvelles chaumières pour y loger deux familles qui quitteraient leurs vieux réduits ; on abattrait ceux-ci et on en construirait d’autres sur le même emplacement.

Sir James répondit : « Précisément ! » et, cette fois, elle supporta le mot avec une patience remarquable.

… Certainement, ces hommes peu riches de leur propre fonds d’idées pouvaient devenir des membres utiles de la société sous une bonne direction féminine… et surtout s’ils étaient heureux dans le choix de leurs belles-sœurs ?…

Pourquoi Dorothée s’obstinait-elle à s’aveugler ainsi sur les véritables sentiments de sir James et à ne pas admettre qu’il la considérât autrement que comme une future belle-sœur ? C’est que sa vie était alors pleine d’espoir et d’activité : elle ne pensait pas seulement à ses plans, elle cherchait aussi des livres sérieux dans la bibliothèque, et se hâtait de faire toute espèce de lectures afin d’être un peu moins ignorante quand elle aurait à causer avec M. Casaubon. Elle faisait aussi des examens de conscience, se demandant si elle n’estimait pas au-dessus de leur valeur ses pauvres efforts, et si elle ne les regardait pas avec ce contentement de soi-même qui est le comble de l’ignorance et de la folie.



CHAPITRE IV


— Sir James paraît décidé à faire tout ce que tu voudras, dit Célia, tandis qu’elles revenaient en voiture d’une visite au nouvel emplacement des chaumières.