Page:Eliot - Middlemarch, volume 2.djvu/160

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un jour des terres qui m’appartiendraient en propre. Je suis sûr que j’acquerrais facilement de l’instruction dans ces matières, surtout si je pouvais, de façon ou d’autre, être sons votre direction.

— Doucement, mon garçon dit Caleb, ayant devant les yeux l’image de Suzanne. Qu’avez-vous dit de tout cela à votre père ?

— Rien encore ; mais il faudra que je le lui dise. J’attends seulement pour savoir ce que je pourrais faire. Je suis très fâché de le contrarier, mais, à vingt-quatre ans, un homme devrait avoir la liberté de décider pour lui-même. Comment pouvais-je savoir, quand j’avais quinze ans, ce qu’il me conviendrait de faire à l’heure qu’il est ? Mon éducation a été une erreur.

— Mais écoutez bien ceci, Fred, dit Caleb. Êtes-vous sûr que Mary vous aime et vous accepterait jamais ?

— J’ai prié M. Farebrother de lui parler, parce qu’elle me l’avait défendu, à moi, je ne savais pas comment faire autrement, dit Fred comme pour s’excuser ; et il dit que j’ai toute raison d’espérer, si je réussis à me créer une position honorable, je veux dire en dehors de l’Église. Vous me trouvez inexcusable, je le pense bien, monsieur Garth, de vous troubler et de vous ennuyer de mes désirs au sujet de Mary, avant d’avoir rien fait du tout pour moi-même. Sans doute je n’ai pas les plus légers droits, j’ai même une dette envers vous, qui ne sera jamais acquittée, alors même que j’aurai été en état de vous en rembourser l’argent.

— Si, mon garçon, vous avez un droit, répondit Caleb avec beaucoup d’émotion dans la voix. Les jeunes gens ont toujours un droit sur les vieux, c’est de se faire aider par eux dans leur carrière. J’ai été jeune, moi aussi, une fois, et j’ai eu à me tirer d’affaire sans beaucoup d’aide ; mais un peu d’aide eût été la bienvenue, quand ce n’eût été que pour l’amour de la sympathie. Mais j’ai besoin d’y réfléchir. Venez