Page:Eliot - Middlemarch, volume 2.djvu/28

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pour voir s’il employait bien tous les moyens possibles dans les cas qu’il avait à soigner.

Mais, dans cette période critique de ses débuts, Lydgate fut heureusement aidé par ce que nous autres, mortels, appelons inconsidérément la chance. Il n’est pas, je crois, de médecin nouveau qui soit jamais arrivé dans un endroit, sans y faire des cures qui frappent tout le monde — des cures qu’on peut appeler les certificats de la chance, et qui méritent autant de crédit que toutes les cures écrites ou imprimées. Plusieurs malades guérirent pendant que Lydgate les soignait, quelques-uns même revinrent de dangereuses maladies et on remarqua que le nouveau docteur, avec ses nouvelles méthodes, avait au moins le mérite de ramener les gens du bord de la tombe. Le bruit qu’on faisait en de telles occasions était particulièrement désagréable à Lydgate, en ce qu’il lui donnait précisément cette sorte de prestige que peut souhaiter la médiocrité sans scrupule, fait pour servir de prétexte aux imputations des autres médecins, dont l’aversion naissante lui reprocherait d’encourager ces énormes bourdes de l’ignorance, pour se faire mousser. Sa fierté eût été tentée de s’en justifier tout haut, sans la sage réflexion qu’il était aussi inutile de combattre les interprétations de l’ignorance que de fouetter le brouillard, — et la chance persistait à se servir de ces interprétations.

Mistress Larcher, charitablement inquiète de certains symptômes alarmants dans la santé de sa femme de ménage, pria le docteur Minchin, un jour qu’il vint la voir, de s’occuper un peu d’elle et de lui donner un certificat pour l’hôpital ; sur quoi, après l’avoir examinée, M. Minchin rédigea un exposé de son cas, dans lequel il reconnut une tumeur, et recommanda la personne munie du billet, Nancy Nash, comme malade externe. Nancy laissa lire le papier du docteur Minchin aux gens dans le grenier desquels elle