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Fred. Mettez-vous le cœur bien en repos sur ce point que, si vous restez dans le bon chemin, d’autres choses resteront aussi dans le bon chemin.

— Je n’oublierai jamais ce que vous avez fait, répondit Fred. Je ne puis rien dire qui me semble mériter d’être dit ; seulement je tâcherai que votre bonté ne se soit pas répandue en vain.

— Cela suffit. Bonsoir, et que Dieu vous bénisse.

Ils se séparèrent ainsi. Mais ils vaguèrent encore longtemps, chacun de son côté, avant de quitter la nuit étoilée. Les réflexions qui occupaient l’esprit de Fred peuvent à peu près se traduire ainsi : « C’eût été certainement une heureuse chose pour elle d’épouser Farebrother, — mais si elle m’aime mieux — et si je suis un bon mari ? »

Quant aux méditations de M. Farebrother, peut-être peuvent-elles se résumer dans un simple haussement d’épaules, accompagné d’une petite réflexion : « Songer au rôle qu’une petite femme peut jouer dans la vie d’un homme, pour que renoncer à elle équivaille à une excellente imitation de l’héroïsme, et que la conquérir équivaille peut-être à une bonne leçon de conduite ! »



CHAPITRE V


Lydgate, heureusement, avait fini par perdre au billard, et il n’en emportait pas d’encouragement à poursuivre plus longtemps la fortune. Il ressentit au contraire un véritable dégoût de lui-même lorsqu’il eut à payer le lendemain une perte de quatre à cinq livres, et partout où il allait, une vision des plus pénibles l’accompagnait, celle du personnage qu’il avait joué, digne émule des habitués du Dragon Vert qu’il avait coudoyés. Entre un philosophe qui a succombé à