innocemment pris l’argent pour le résultat de cette communication, ne sachant pas qu’il pouvait y avoir un lien entre ce prêt et les soins donnés à Raffles. Et après tout, les soupçons sur les motifs de Bulstrode pouvaient être injustes.
Mais alors se présenta à son esprit la question de savoir si sa conduite eût été absolument la même, au cas où il n’eût pas accepté l’argent. Certes, si à son arrivée il avait trouvé Raffles encore vivant, en état de continuer le traitement, et qu’il eût pu imaginer quelque manquement à ses prescriptions, il eût fait une enquête sévère, et, si ses conjectures s’étaient trouvées vérifiées, il se fût retiré, en dépit de sa récente et lourde obligation. Mais en trouvant le malade mort, se serait-il, lui Lydgate, abstenu de toute enquête, dans le cas où sa main n’aurait pas reçu cet argent ? La crainte d’offenser Bulstrode, le doute qui pèse sur la justesse absolue de tout traitement médical, l’argument que sa méthode de traitement serait condamnée par la plupart de ses confrères, toutes ces considérations auraient-elles pesé du même poids sur sa conduite ?
C’était là le coin troublé de sa conscience, tandis que Lydgate passant en revue les derniers événements se raidissait contre tout reproche. Sur cette question du traitement d’un malade, avec la règle qu’il s’était imposée de faire toujours ce qu’il croyait le mieux pour la vie qui lui était confiée, sur cette question, s’il eût eu toute son indépendance, il se fût montré absolument intraitable. Tandis que, dans le fait, il s’était arrêté à cette équivoque que la désobéissance à ses ordres, de quelque façon qu’elle se fût produite, ne pouvait être regardée comme coupable, que l’obéissance à ses prescriptions avait pour l’opinion dominante tout autant de chances au contraire d’amener un dénouement fatal, et qu’il n’y avait dans tout cela qu’une simple affaire de convenance, lui qui, au temps où il était libre, n’avait cessé de