Page:Eliot - Middlemarch, volume 2.djvu/481

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société trop agréable pour se préoccuper de la convenance de la chose.

— Eh bien ! vous savez, Chettam, dit M. Brooke avec bonne humeur en se caressant la jambe, je ne puis tourner le dos à Dorothée. Il faut jusqu’à un certain point que je lui tienne lieu de père. Je lui ai dit : « Ma chère, je ne puis plus me refuser à votre volonté. » J’avais commencé par parler énergiquement. Mais ce que je puis faire, c’est d’annuler la substitution de biens : ce ne sera pas sans argent et sans peine, mais je puis le faire, vous savez.

M. Brooke adressa de petits signes de tête à sir James, convaincu qu’en même temps qu’il témoignait de sa force de volonté, il entrait jusqu’à un certain point dans les idées du baronnet. Il avait rencontré plus juste qu’il ne pouvait s’en douter ; il avait touché un point délicat qui fit rougir sir James. La manière dont il envisageait le mariage de Dorothée avec Ladislaw tenait en partie à un préjugé excusable ou même à une opinion justifiable, en partie à une répugnance jalouse, presque aussi jalouse dans le cas de Ladislaw que dans celui de Casaubon. Il était convaincu que ce mariage serait fatal à Dorothée. Mais parmi ces sentiments il s’en glissait un autre, qu’il était trop bon et trop honorable pour s’avouer à lui-même : la réunion des deux domaines de Tipton et de Freshitt, bien situés dans une même enceinte, était, à n’en pas douter, une perspective qui le flattait pour son fils et héritier. Aussi, lorsque M. Brooke en appela à cet argument en branlant la tête, sir James éprouva un embarras subit ; il se fit un arrêt dans sa gorge. Il avait puisé une éloquence inusitée dans le premier mouvement de sa colère, mais le sacrifice expiatoire de M. Brooke, favorable à ses secrets désirs, lui enchaînait la langue, plus encore que l’observation caustique de M. Cadwallader.

Cependant, après l’allusion de son oncle à la cérémonie