Page:Eliot - Middlemarch, volume 2.djvu/497

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est encore un grand commencement, comme il le fut pour Adam et Ève qui passèrent leur lune de miel dans l’Éden, tandis qu’ils eurent leur premier-né au milieu des ronces et des chardons du désert. C’est encore le commencement du poème épique du foyer, que de conquérir peu à peu ou de perdre sans retour cette union complète qui des années croissantes fait une gradation, et de la vieillesse la moisson des doux souvenirs vécus en commun.

Quelques-uns se mettent en route comme les anciens Croisés, magnifiquement équipés d’espoir et d’enthousiasme ; et en chemin, l’un contre l’autre et contre le monde, ils se heurtent, faute de patience. Tous ceux qui se sont intéressés à Fred Vincy et à Mary Garth seront heureux d’apprendre qu’eux du moins ne furent pas soumis à une semblable épreuve, mais arrivèrent ensemble à un solide et complet bonheur. Fred surprit ses voisins en beaucoup de choses. Il devint assez distingué dans son coin de province comme fermier théorique et pratique, et il publia sur la Culture des plantes fourragères et l’Économie de la nourriture du bétail un travail qui lui valut de grandes félicitations à des meetings agricoles. À Middlemarch, l’admiration était plus réservée. L’opinion générale inclinait à attribuer tout le talent d’auteur de Fred à sa femme, parce qu’on ne s’était jamais attendu à voir Fred Vincy écrire sur les navets et les betteraves.

Mais quand Mary, à son tour, écrivit pour ses garçons un petit livre intitulé Histoire des grands hommes tirée de Plutarque et le fit imprimer et publier chez Gripp et Cie, à Middlemarch, tout le monde dans la ville s’empressa d’en attribuer l’honneur à Fred, faisant remarquer qu’il avait été à l’Université où on étudiait les anciens et qu’il aurait pu entrer dans l’église s’il avait voulu.

Il fut de cette manière clairement établi que Middlemarch ne s’était jamais trompé dans ses prévisions, et qu’il n’était