blait aussi insignifiante que la chute de la feuille d’été était chargée de la force de la destinée pour certaines âmes que nous connaissons, et devait créer les joies et les chagrins de toute leur vie.
La résolution de Silas Marner de garder l’enfant de la « vagabonde » fut un acte dont les gens du village ne s’étonnèrent guère moins que du vol de son argent, et sur lequel la conversation roula presque aussi fréquemment. À cet adoucissement des sentiments du public à son égard, qui datait de son malheur, aux soupçons et à l’aversion qui s’étaient transformés en une pitié assez méprisante pour un être isolé et faible d’esprit tel que lui, venait maintenant s’ajouter une sympathie plus active, principalement de la part des femmes. Les bonnes mères, qui savaient quelle peine il fallait se donner pour conserver les enfants bien portants et charmants ; les mères indolentes, qui connaissaient l’ennui d’être dérangées, — alors qu’elles se croisaient les bras ou se grattaient les coudes, — par les prédispositions malicieuses des bébés ne faisant que commencer à se tenir sur leurs jambes, prenaient le même intérêt à former des conjectures. Elles se demandaient comment un homme seul se tirerait d’affaire avec une enfant de deux ans sur les bras, et elles étaient également disposées à suggérer à Marner leurs conseils. Les bonnes mères lui parlaient surtout de ce qu’il serait préférable qu’il fit, et les mères indolentes lui disaient avec insistance ce qu’il ne viendrait jamais à bout de faire.