Page:Eliot - Silas Marner.djvu/247

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son oreille, et, après avoir guetté les résultats de ce cliquetis, elle en avait tiré la leçon philosophique que la même cause devait produire le même effet. Silas s’était assis à son métier, et le bruit du tissage avait recommencé ; mais il avait laissé ses ciseaux sur un rebord que le bras d’Eppie était assez long pour atteindre. Alors, semblable à une petite souris qui guette le moment opportun, elle avait quitté furtivement son coin, s’était emparée de l’objet et était retournée en chancelant vers le lit, haussant les épaules, comme pour cacher le larcin. Elle avait une intention arrêtée en ce qui concernait l’usage des ciseaux. Après avoir coupé la bande de toile d’une façon irrégulière, mais efficace, elle s’était élancée en une couple de secondes vers la porte ouverte, où l’éclat du soleil l’invitait, tandis que le pauvre Silas la croyait plus sage que de coutume. Ce fut seulement quand il lui arriva d’avoir besoin de ses ciseaux, que l’effrayante réalité vint le frapper. Eppie s’était enfuie toute seule, — elle était peut-être tombée dans la Carrière. Silas, ébranlé par la crainte la plus terrible qui pût l’assaillir, s’élança au dehors en appelant : « Eppie ! » et courut vivement autour de l’espace sans clôture, explorant les cavités sèches où elle aurait pu tomber, et questionnant ensuite de son regard effrayé la surface unie et rougeâtre de l’eau. Des gouttes froides lui couvraient le front. Depuis combien de temps était-elle sortie ? Il lui restait une espérance : c’est qu’elle se fût glissée à