Page:Eliot - Silas Marner.djvu/25

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« Je suis cruellement frappé, je ne puis rien dire. Dieu me justifiera. »

L’assemblée, revenue dans la sacristie, délibéra de nouveau. Tout recours aux mesures légales, à l’effet d’établir la culpabilité de Silas, était contraire aux principes de l’Église de la Cour de la Lanterne. D’après ces principes, les poursuites étaient défendues aux chrétiens, lors même que le fait eût été moins scandaleux pour la communauté. Toutefois, il était du devoir des membres de prendre d’autres mesures, afin de découvrir la vérité, et ils résolurent de prier et de jeter le sort[1]. Cette résolution ne peut causer de l’étonnement qu’aux personnes étrangères à cette obscure vie religieuse qui se passe dans les ruelles de nos villes. Silas s’agenouilla avec ses frères, comptant sur l’intervention directe de la divinité pour prouver son innocence, mais sentant que, malgré tout, de l’affliction et des chagrins lui étaient réservés, et que sa confiance dans l’humanité venait d’être cruellement meurtrie. Le sort déclara que Silas Marner était coupable. Il fut solennellement exclu de la secte, et sommé de rendre l’argent volé : ce serait seulement après avoir avoué sa faute en signe de repentir, qu’il pourrait être reçu de nouveau dans le giron de son Église. Marner écouta en silence. Enfin, lorsque tout le monde se leva pour partir, il s’avança

  1. Coutume en grand usage chez les Juifs, et dont la Bible rapporte de nombreux exemples. (N. du Tr.)