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Page:Eliot - Silas Marner.djvu/270

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et qu’il prenait part à l’effet que toute chose produisait sur elle, il en était venu lui-même à s’approprier les formes des coutumes et de la croyance, qui étaient le moule de la vie à Raveloe. Et, comme avec le réveil des sentiments la mémoire se réveillait aussi, il avait commencé à méditer sur les éléments de son ancienne foi et à les mêler à ses nouvelles impressions, jusqu’à recouvrer la conscience d’un rapport entre le passé et le présent. La croyance en une bonté tutélaire et la confiance dans l’humanité qui naissent avec toute paix et toute joie pures, avaient produit en lui l’idée vague que quelque erreur, quelque méprise, avait jeté une ombre ténébreuse sur les jours de ses meilleures années. En outre, il lui devenait de plus en plus facile d’ouvrir son cœur à Dolly Winthrop ; aussi, il communiqua peu à peu à cette nouvelle amie tout ce qu’il pouvait raconter de sa jeunesse. Cette communication fut nécessairement une opération lente et difficile, car la pauvre éloquence de Silas n’était nullement secondée par la facilité de compréhension de Dolly, à qui son expérience limitée du monde extérieur ne donnait aucune clef des coutumes étrangères. Par suite, toute idée nouvelle était un sujet d’étonnement auquel il leur fallait s’arrêter à chaque point du récit. Ce ne fut que par fragments, et avec des intervalles permettant à Dolly de méditer sur les choses qu’elle avait entendues, jusqu’à ce qu’elles lui fussent devenues assez familières, que Silas arriva