Page:Eliot - Silas Marner.djvu/303

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« Je me demande s’il y songera plus ou moins en vieillissant, se disait Nancy ; j’ai bien peur qu’il n’y pense davantage. Les personnes âgées souffrent de ne pas avoir d’enfants : que ferait mon père sans Priscilla ? Et si je meurs, Godfrey sera bien seul,… lui qui fréquente si peu ses frères. Mais je ne veux pas me tourmenter outre mesure, ni essayer de prévoir les événements : il faut que je fasse de mon mieux pour le présent. »

À cette dernière pensée, Nancy s’éveilla de sa rêverie, et reporta ses regards sur la page abandonnée plus longtemps qu’elle ne se l’imaginait ; car, bientôt après, elle fut étonnée de l’entrée de la servante qui apportait le thé. C’était, en fait, un peu plus tôt que de coutume ; mais Jeanne avait ses raisons.

« Votre maître est-il rentré dans la cour, Jeanne ?

— Non, madame, il ne l’est pas, » répondit Jeanne, accentuant légèrement sa réponse, sans que sa maîtresse y prit garde cependant. « Je ne sais pas si vous les avez vus, madame, » continua Jeanne, après un court silence, « mais il y a des gens qui passent rapidement en face de la fenêtre du devant, et se dirigent tous du même côté. Je crois qu’il est arrivé quelque chose. Il n’y a pas un seul domestique dans la cour, sans cela je l’aurais envoyé voir ce qui se passe. Je suis montée dans la plus haute mansarde, mais on ne peut rien distinguer à cause des arbres. J’espère qu’il n’est arrivé de mal à personne, voilà tout.