Page:Eliot - Silas Marner.djvu/80

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retour, et fortifié de plus en plus dans son cœur le monotone désir d’entendre la réponse de son bruit monotone. Et son trésor, tandis qu’il était courbé au-dessus et le voyait s’accroître, comprimait dans son âme la faculté d’aimer, la durcissait et l’isolait comme les pièces de métal qui le composaient.

Aussitôt qu’il eut chaud, il se mit à penser que ce serait bien long d’attendre la fin du souper, avant de retirer ses guinées, et qu’il aurait du plaisir à les voir sur la table devant lui pendant qu’il ferait son régal inaccoutumé ; car la joie est le meilleur des vins, et les guinées de Marner étaient un vin d’or de cette espèce.

Il se leva et plaça sa chandelle sur le sol près de son métier, ne soupçonnant rien ; puis il balaya le sable sans remarquer aucun changement, et enleva les briques. La vue du trou vide fit battre son cœur avec violence, mais la croyance que son or n’était plus là ne put venir immédiatement ; seule, la terreur vint, suivie de l’effort ardent pour chasser cette terreur. Il passa sa main tremblante tout autour de la cachette, essayant de s’imaginer qu’il était possible que ses yeux l’eussent trompé ; ensuite, il tint la chandelle dans le trou et fit une inspection attentive, tremblant de plus en plus. Enfin, son agitation devint si violente qu’il laissa tomber la chandelle, et porta les mains à sa tête, cherchant à se soutenir afin de pouvoir penser. Avait-il, par une détermination soudaine, mis son or dans quelque autre lieu le soir précédent, et l’aurait-il ensuite oublié ? L’homme