Page:Eliot - Silas Marner.djvu/84

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porte, car il lui semblait qu’il n’avait plus rien à perdre. Il courut rapidement, jusqu’à ce que le manque de respiration l’obligeât à ralentir le pas comme il entrait dans le village, au tournant qui se trouvait près de l’auberge de l’Arc-en-Ciel.

L’Arc-en-Ciel, aux yeux de Marner, était un lieu somptueux de rendez-vous pour les maris opulents et corpulents, dont les épouses avaient des provisions superflues de linge. C’était l’endroit où il devait probablement rencontrer les autorités et les dignitaires de Raveloe, — où il pourrait le plus rapidement annoncer le vol dont il avait été l’objet. Il souleva le loquet et entra à droite dans une buvette, sorte de cuisine brillamment éclairée et dans laquelle les clients les moins considérables de la maison avaient l’habitude de s’assembler. Le cabinet particulier à gauche était réservé à la société d’élite, et là le squire Cass jouissait fréquemment du double plaisir de la convivialité et de la condescendance. Mais le cabinet restait dans l’obscurité ce soir, car les principaux personnages faisant l’ornement du cercle qui s’y tenait, assistaient tous — comme Godfrey Cass — au bal de la fête de Mme Osgood, Il en résultait que le groupe assis sur les bancs à hauts dossiers dans la buvette, se trouvait plus nombreux qu’à l’ordinaire. Plusieurs notables qui, sans la circonstance, eussent été admis aux honneurs du cabinet particulier, et eussent procuré une plus belle occasion à ceux qui étaient d’un rang plus