élevé, de trancher du maître et de prendre des airs protecteurs, se contentaient alors de varier leur plaisir en prenant leur grog, là où ils pouvaient eux-mêmes faire les importants et se montrer affables, — dans la société des simples buveurs de bière.
CHAPITRE VI
La conversation qui était extrêmement animée lorsque Silas arriva à la porte de l’Arc-en-Ciel, avait, ainsi qu’à l’ordinaire, été languissante et intermittente au commencement de la réunion de la compagnie. Les habitués s’étaient mis tout d’abord à fumer leurs pipes dans un silence qui tenait de la gravité. Les plus importants d’entre eux — ceux qui buvaient des spiritueux et étaient assis le plus près du feu — se fixaient les uns les autres, comme si un pari dépendait du premier qui fermerait les yeux. Quant aux buveurs de bière, — gens pour la plupart vêtus de vestes de futaine et de blouses, — ils restaient les paupières fermées, et se passaient les mains sur la bouche. On eût dit qu’absorber leurs gorgées de bière constituait pour eux un devoir funèbre, qu’ils remplissaient avec une tristesse gênante. Enfin, M. Snell, l’aubergiste, homme disposé à rester neutre, et accoutumé à se tenir éloigné des différends humains, comme inhérents à des êtres qui avaient tous au