Page:Emerson - Société et solitude, trad. Dugard.djvu/21

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étaient chez eux ? Si mon compagnon n’a pas besoin de moi, je le découvre en un instant, et quand le bon accueil n’est plus, des cordes ne pourraient me retenir. On voudrait croire que les affinités s’affirment avec une réciprocité plus sûre.

Ici encore la Nature se plaît, comme elle le fait si souvent, à nous mettre entre des oppositions extrêmes, et notre salut est dans l’adresse avec laquelle nous suivons la diagonale. La solitude est impraticable, et la société fatale. Il nous faut tenir notre tête dans l’une, et nos mains dans l’autre. Nous y arriverons si, en gardant l’indépendance, nous ne perdons pas notre sympathie. Ces montures merveilleuses doivent être conduites par des mains délicates. Nous avons besoin d’une solitude telle qu’elle nous attache à ses révélations quand nous sommes dans la rue et les palais ; car beaucoup d’hommes sont intimidés dans la société, et vous disent des choses justes en particulier, mais ne s’y tiennent pas en public. Toutefois ne soyons pas victimes des mots. Société et solitude, ce sont là des termes décevants. Ce qui importe, ce n’est pas le fait de voir plus ou moins de gens, mais la promptitude de la sympathie ; une âme saine tirera ses principes de l’intuition, en une ascension toujours plus pure vers le bien suffisant et absolu, et acceptera la société comme le milieu naturel où ils doivent s’appliquer.