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LA CIVILISATION

Un certain degré de progrès depuis l’état le plus grossier où l’on trouve l’homme — l’état de celui qui habite dans les cavernes ou sur les arbres, comme le singe ; l’état du cannibale, du mangeur de limaçons écrasés, de vers et de détritus — un certain degré de progrès au-dessus de ce point extrême s’appelle la Civilisation. C’est un mot vague, complexe, comprenant bien des degrés. Personne n’a essayé de le définir. M. Guizot, écrivant un livre sur la question, ne le fait pas. La civilisation implique le développement d’un homme hautement constitué, amené à une délicatesse supérieure de sentiments, ainsi qu’à la puissance pratique, à la religion, à la liberté, au sens de l’honneur, et au goût. Dans notre embarras à définir en quoi elle consiste, nous le suggérons d’ordinaire par des négations. Un peuple qui ignore les vêtements, le fer, l’alphabet, le mariage, les arts de la paix, la pensée abstraite, nous l’appelons barbare. Et quand il a trouvé ou importé nombre d’inventions, comme l’ont fait les Turcs et les Mores, il y a souvent quelque complaisance à l’appeler civilisé.

Chaque nation se développe d’après son génie, et a