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Page:Emery - Vierges en fleur, 1902.djvu/159

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VIERGES EN FLEUR

Les meubles étaient de bois grossier, rudement taillés ; une table d’épais madriers, quelques bancs et les lits.

Oh ! ces lits. Leur aspect tout d’abord épouvante, quand on apprend que des êtres humains s’y entassent, s’y emprisonnent. On dirait des bahuts ; la porte, étroite, est ajourée. Les couchettes s’étagent, si étroites, si rapprochées qu’on y peut à peine se mouvoir.

Maintenant la tante de Luce dormait, disparue en un coin d’ombre de la chambre. Dans l’âtre brûlaient des fagots d’ajoncs. L’hôtesse préparait le repas, Philbert et Luce, l’un contre l’autre, se tenaient sur un banc près du feu. Le rougeoiement de la flambée mettait une lueur étrange aux yeux de la jeune fille ; son corps, en frôlant Philbert, avait de lentes et félines caresses :

Elle dit :

— C’est amusant, n’est-ce pas, de se retrouver ici, dans une chaumière, et j’en suis ravie. Après votre départ, ce matin, j’ai eu la tentation subite et presque irrésistible de visiter ce pays perdu qui vous attirait, et sur-le-champ je suis partie. Je me demande maintenant si vous ne m’avez pas appelée vers vous, par un de ces mystères troublants de la volonté qu’on subit, mais qu’on ne peut expliquer.