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Page:Emery - Vierges en fleur, 1902.djvu/228

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VIERGES EN FLEUR

— À ce moment, je croyais que tout espoir de bonheur s’était envolé ; que vous aviez préféré à mon amour sincère la fortune du hobereau. Et c’était ma revanche, à cette heure de souffrance, de fouetter aussi votre cupidité, madame. Non, je ne suis pas, j’en conviens, aussi riche que je le proclamais. Cependant nous pourrons, dans une douce et aimable médiocrité, nous créer un nid de félicité, n’est-pas, chère Luce ?

Luce, les yeux voilés sous les doigts, pleurait toujours.

— Répondez, répondez, ma Luce, mon amour.

— Ah ! je suis malheureuse…

Philbert, en entendant ces mots, défaillit presque. Une larme jaillit de ses yeux. Mais cette faiblesse fut aussitôt domptée. Et l’ennemi des vierges reparut, sarcastique, hautain et dédaigneux, avec sa belle allure impertinente, son rire :

— Lucette, je vous plains et je pleure avec vous. Oui, vraiment, c’est navrant : le rêve d’or s’écroule. Mais du moins il vous reste un espoir : votre cœur doit le bien accueillir. Messire du Guiny lui, n’a pas menti. Ses deux millions toujours vous attendent, ma chère. Comme vous auriez tort de ne pas vous jeter sur ce butin tentant ! Allons, tendez la main… rien n’est perdu, sinon ma tendresse : pauvre chose qui ne vaut même pas une larme, un regret !