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Page:Emery - Vierges en fleur, 1902.djvu/313

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VIERGES EN FLEUR

plus, reliant le traître à celle qui l’avait chéri. Mais pourquoi Marie-Reine avouait-elle, presque avec orgueil, conserver en soi l’amertume bénie de ses désespérances ?

Doucement, elle continua :

— Mais vous m’aviez parlé tantôt de sortilège… Et ce mot m’a troublée…

Philbert répondit :

— À quoi bon ? mon histoire ne peut vous intéresser… voici que la nuit s’avance. Votre mère peut-être déjà s’inquiète. Puis, je vous avoue que je suis las, et que je me sens terrassé par le sommeil…

— Oh ! murmura Marie, pourquoi maintenant me parlez-vous ainsi ? votre voix est mauvaise et dure, et je sens que vous êtes, vous qui vous disiez tantôt mon frère de calvaire, presque mon ennemi désormais… Oui, je le sens…

— Un ennemi… Rassurez-vous, mademoiselle. Car rien ne vous désigne à mon inimitié. Mes camarades de Paris m’appellent : l’ennemi des vierges !… Adieu… J’espère que vos sanglots ne m’éveilleront pas !

Et Philbert, dans la nuit, jeta un rire étrange, tandis que Marie-Reine, inquiète, ouvrait la porte.