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Page:Emery - Vierges en fleur, 1902.djvu/58

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VIERGES EN FLEUR

que issue qu’elle offre, le mariage, est un leurre pour les pauvres filles sans dot et sans richesse. Pourquoi n’ont-elles pas l’audace de briser l’entrave et de courir dans les champs de la joie ? C’est la prostitution, la honte, crie la loi. Qu’importe : l’on se rue. En avant ! En avant !…

Philbert s’était assis, les yeux clos, et la tête affaissée dans ses mains.

Quand il se redressa, dans la pâle lumière des lustres, il aperçut les demoiselles de Kerbiquet, en toilettes de soie pompadour, fraîches et roses, ainsi que les marquises des estampes anciennes. Leurs chevelures blondes étaient poudrerizées, leurs gorges et leurs bras transparaissaient en de fines dentelles.

Philbert balbutia :

— Très nobles et belles demoiselles, recevez le merci d’un passant inconnu que vous avez ravi de votre accueil charmant. Mais quelle confusion pour moi d’être venu ici, en touriste incongru que l’on tolère une heure ! J’aurais dû m’insurger contre vos bienveillances, prendre congé, partir…

— Vous ne partirez pas, répondit Jeanne. Vous êtes prisonnier ici…

— Jusqu’à ?…

— Demain…

— Demain !… Ah ! je voudrais être un grand