Aller au contenu

Page:Emile Littre - Etudes et glanures - Didier, 1880.djvu/417

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

reste, ces préliminaires, qui d’abord absorbaient toute mon attention et qui plus tard se réduisirent d’eux-mêmes à leur proportion véritable, ne furent pas complètement perdus et, dans l’œuvre définitive, à leur rang alphabétique, j’ai donné une certaine place aux préfixes et aux suffixes, en en expliquant l’origine et la signification ; innovation non inutile, car les préfixes et les suffixes sont des éléments français dont la connaissance importe à l’analyse des mots.

Je proposai mon projet à M. Hachette, le grand libraire, à qui me liait une vieille amitié de collège. Il l’accepta.

Le titre de l’ouvrage devait être Nouveau Dictionnaire étymologique de la langue française. Un traité entre nous fut conclu. Il m’avança quatre mille francs. Cela se passait en 1841.

Cinq années s’écoulèrent sans que j’eusse mis sur le chantier le travail dont j’avais pris l’initiative et la responsabilité. C’était, j’en conviens, bien du retard et bien de la négligence. Je ne puis me justifier, je ne puis que m’excuser et plaider les circonstances atténuantes. J’eus, dans cet intervalle, le malheur de perdre ma mère. Cette mort me plongea dans un deuil profond, et, pendant de longs mois, je demeurai incapable de reprendre le cours habituel et nécessaire de mes occupations. Je dis nécessaire, car cette oisiveté par chagrin porta beaucoup de découragement dans mes petites affaires. D’autre part, quand je commençai de revenir à moi, M. Baillière, autre éditeur qui me fut toujours bienveillant et ami, me talonna pour Hippocrate, dont, avec raison, il voulait que les volumes se suivissent avec quelque régularité. Sous ces diverses pressions, je ne sus pas disposer mon temps pour le dictionnaire étymologique,