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Page:Emile Littre - Etudes et glanures - Didier, 1880.djvu/464

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mon éditeur M. Hachette, et quelques amis datant du collège ou à peu près. Devenu malade, il me fallut renoncer absolument aux réunions et aux repas. J’espérai d’abord que ce n’était qu’un ajournement ; mais j’espérai en vain. L’ajournement était définitif. Le temps n’accommoda rien, il empira tout et, en écrivant ces lignes, je tiens la plume d’une main débile et endolorie.

Un incident m’informa de bonne heure du succès que mon livre, une fois achevé, obtenait. Jusque-là, les livraisons publiées l’une après l’autre n’avaient eu qu’une vente très circonscrite, un succès d’estime au delà duquel on n’irait pas, pensaient plusieurs autour de moi, juges d’ailleurs éclairés et bienveillants. Et, de fait, les dimensions volumineuses du dictionnaire, sa cherté absolue et le caractère d’érudition qui y était empreint semblaient lui interdire l’accès du grand public. Toutefois la maison Hachette conservait bon espoir. J’étais plutôt, ne fût-ce que par crainte des déceptions, du côté de la défiance, lorsque, me trouvant à Versailles, mon collègue à l’Assemblée nationale, M. Carnot père, me demanda comment il se faisait qu’on ne pouvait se procurer un exemplaire, de mon dictionnaire. À cette question je n’eus point de réponse, et je supposai que le libraire à qui M. Carnot s’était adressé avait commis quelque méprise. Il n’en était rien. J’eus hâte, on le pense bien, de m’enquérir auprès de M. Hachette, qui m’apprit qu’en effet la demande avait dès le premier abord épuisé ce qu’on avait de prêt en exemplaires, qu’on avait été, et l’on s’en félicitait, pris au dépourvu, mais que, dès à présent, un nombre de presses suffisant pour satisfaire aux exigences, était en pleine activité. Ces presses ne