Page:Emile Zola, Mes haines - Mon salon - Edouard Manet, Ed. Charpentier, 1893.djvu/148

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conclut-il, que les mœurs, par conséquent la tournure d’esprit et l’aptitude générale d’une population, dépendent, pour le commun des hommes, des circonstances physiques et morales au milieu desquelles ils naissent et vivent. Mais, si la foule se laisse docilement marquer d’une même empreinte, les hommes supérieurs résistent. » Ainsi, tout est sauvé ; la liberté de l’âme est conquise, — pour les hommes supérieurs. Ce ne sera plus que la masse, le peuple, qui obéira aux influences du sol ; le génie naîtra et se développera en tous lieux, il sera indépendant de la terre. M. Victor Duruy est un homme prudent.

L’œuvre entière est une glorification de la France, et c’est surtout à ce point de vue qu’elle est saine et fortifiante. Il se dégage des pages un amour profond du pays, une admiration sans bornes pour sa beauté et sa puissance. La France est l’unité dans la variété ; elle est grande par l’admirable solidarité qui existe entre ses provinces et par sa position unique au monde. L’écrivain parle avec enthousiasme de ce sol français, qui a tous les terrains, tous les végétaux et tous les climats de la vieille Europe ; de ce peuple français, si divers de types et de tempéraments, qui vit de contrastes et de mutuelle dépendance. Nous sommes la grande route des idées entre le Nord et le Midi ; nous élaborons les pensées de tout un monde. De là viennent cette prépondérance intellectuelle et cette puissante nationalité dont M. Victor Duruy a cherché les causes en philosophe historien.