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Page:Emile Zola, Mes haines - Mon salon - Edouard Manet, Ed. Charpentier, 1893.djvu/30

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rend père, et qu’ayant ainsi atteint le but de ses désirs, il juge à propos, dans une longue lettre absolument vide, de faire abandon de son nouveau titre. Où l’auteur a-t-il voulu en venir ? Que signifie cette enfilade de scènes mélodramatiques et inexplicables ? J’ai cherché le sens de ce dénoûment insensé, et je n’y ai trouvé encore une fois qu’une flatterie basse pour les goûts grossiers de la foule qui aime le sang et l’adultère, les faits invraisemblables et les péripéties inattendues. L’œuvre, je ne saurais le répéter trop haut, est une spéculation, une action mauvaise, un roman qui est, avec moins de talent encore, le frère des Mémoires d’une femme de chambre.

Un ami me fait observer que l’abbé*** a obtenu de mon indignation tout ce qu’il en attendait. « Ne voyez vous pas, me dit cet ami, que si les romans dont vous parlez sont des spéculations, le spéculateur a compté sur la colère des honnêtes gens comme sur une publicité assurée. Vos sévérités éveillent la curiosité du public, et tout le mal que vous dites de ces livres est une recommandation pour les personnes qui aiment le fruit défendu. »

Certes, cet ami a une triste opinion des lecteurs. Si je ne parviens pas à chasser le Moine et ses aînés de toutes les maisons honorables, j’obtiendrai peut-être que l’on cache ces volumes sous l’oreiller, comme des volumes honteux.