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Page:Emile Zola - La Conquête de Plassans.djvu/16

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LES ROUGON-MACQUART.

de lui dégager la face, la serra davantage, en lui passant un bras à la taille.

— Excusez-la, dit-elle avec quelque tristesse ; elle n’a pas la tête forte, elle est restée petite fille… C’est une innocente… Nous ne la tourmentons pas pour apprendre. Elle a quatorze ans, et elle ne sait encore qu’aimer les bêtes.

Désirée, sous les caresses de sa mère, s’était rassurée ; elle avait tourné la tête, elle souriait. Puis, d’un air hardi :

— Je veux bien que vous soyez mon ami… Seulement vous ne faites jamais de mal aux mouches, dites ?

Et, comme tout le monde s’égayait autour d’elle :

— Octave les écrase, les mouches, continua-t-elle gravement. C’est très mal.

L’abbé Faujas s’était assis. Il semblait très-las. Il s’abandonna un moment à la paix tiède de la terrasse, promenant ses regards ralentis sur le jardin, sur les arbres des propriétés voisines. Ce grand calme, ce coin désert de petite ville, lui causaient une sorte de surprise. Son visage se tacha de plaques sombres.

— On est très-bien ici, murmura-t-il.

Puis il garda le silence, comme absorbé et perdu. Il eut un léger sursaut, lorsque Mouret lui dit avec un rire :

— Si vous le permettez, maintenant, monsieur, nous allons nous mettre à table.

Et, sur le regard de sa femme :

— Vous devriez faire comme nous, accepter une assiette de soupe. Cela vous éviterait d’aller dîner à l’hôtel… Ne vous gênez pas, je vous en prie.

— Je vous remercie mille fois, nous n’avons besoin de rien, répondit l’abbé d’un ton d’extrême politesse, qui n’admettait pas une seconde invitation.

Alors, les Mouret retournèrent dans la salle à manger, où ils s’attablèrent. Marthe servit la soupe. Il y eut bientôt un tapage réjouissant de cuillers. Les enfants jasaient. Dé-