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Page:Emile Zola - La Conquête de Plassans.djvu/210

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LES ROUGON-MACQUART.

répétait gracieusement M. Péqueur des Saulaies. Vous ne sauriez croire le plaisir que j’ai à vous apercevoir, tous les jours, aux mêmes heures, dans ce petit paradis. Cela me repose de mes tracas.

— Un bon voisin, c’est chose si rare ! reprenait M. Rastoil.

— Sans doute, interrompait M. de Bourdeu ; monsieur le curé a mis ici une heureuse tranquillité de cloître.

Pendant que l’abbé Faujas souriait et saluait, M. de Condamin, qui ne s’était pas assis, vint se pencher à l’oreille de M. Delangre, en murmurant :

— Voilà Rastoil qui rêve une place de substitut pour son flandrin de fils.

M. Delangre lui lança un regard terrible, tremblant à l’idée que ce bavard incorrigible pouvait tout gâter ; ce qui n’empêcha pas le conservateur des eaux et forêts d’ajouter :

— Et Bourdeu qui croit déjà avoir rattrapé sa préfecture !

Mais madame de Condamin venait de produire une sensation, en disant d’un air fin :

— Ce que j’aime dans ce jardin, c’est ce charme intime qui semble en faire un petit coin fermé à toutes les misères de ce monde. Caïn et Abel s’y seraient réconciliés.

Et elle avait souligné sa phrase en l’accompagnant de deux coups d’œil, à droite et à gauche, vers les jardins voisins. M. Maffre et le docteur Porquier hochèrent la tête d’un air d’approbation ; tandis que les Paloque s’interrogeaient, inquiets, ne comprenant pas, craignant de se compromettre d’un côté ou d’un autre, s’ils ouvraient la bouche.

Au bout d’un quart d’heure, M. Rastoil se leva.

— Ma femme ne va plus savoir où nous sommes passés, murmura-t-il.

Tout le monde s’était mis debout, un peu embarrassé pour prendre congé. Mais l’abbé Faujas tendit les mains :