M. Péqueur des Saulaies causait avec M. Rastoil ; ils feignirent tous deux de n’avoir rien entendu. Madame de Condamin eut un sourire. Elle continua, en interpellant l’abbé Surin :
— N’est-ce pas, monsieur l’abbé, que l’on empèse vos surplis avec une eau gommée très-faible ?
— Oui, madame, avec de l’eau gommée, répondit le jeune prêtre. Il y a des blanchisseuses qui se servent d’empois cuit ; mais ça coupe la mousseline, ça ne vaut rien.
— Eh bien ! reprit la jeune femme, je ne puis pas obtenir de ma blanchisseuse qu’elle emploie de la gomme pour mes jupons.
Alors, l’abbé Surin lui donna obligeamment le nom et l’adresse de sa blanchisseuse, sur le revers d’une de ses cartes de visite. On causait ainsi de toilette, du temps, des récoltes, des événements de la semaine. On passait là une heure charmante. Des parties de raquettes, dans l’impasse, coupaient les conversations. L’abbé Bourrette venait très souvent, racontant de son air ravi de petites histoires de sainteté, que M. Maffre écoutait jusqu’au bout. Une seule fois madame Delangre s’était rencontrée avec madame Rastoil, toutes deux très-polies, très-cérémonieuses, gardant dans leurs yeux éteints la flamme brusque de leur ancienne rivalité. M. Delangre ne se prodiguait pas. Quant aux Paloque, s’ils fréquentaient toujours la sous-préfecture, ils évitaient de se trouver là, lorsque M. Péqueur des Saulaies allait voisiner avec l’abbé Faujas ; la femme du juge restait perplexe, depuis son expédition malheureuse à l’oratoire de l’œuvre de la Vierge. Mais le personnage qui se montrait le plus assidu était certainement M. de Condamin, toujours admirablement ganté, venant là pour se moquer du monde, mentant, risquant des ordures avec un aplomb extraordinaire, s’amusant la semaine entière des intrigues qu’il avait flairées. Ce grand vieillard, si droit dans sa re-