à deux reprises, avait cru devoir mettre les visiteurs à leur aise, en se montrant. Mais elle souffrait de voir l’abbé au milieu de tout ce monde ; elle attendait qu’il fût seul, elle le préférait, grave, marchant lentement, sous la paix de la tonnelle. Les Trouche, eux, le mardi, reprenaient leur espionnage envieux, derrière les rideaux ; tandis que madame Faujas et Rose, du fond du vestibule, allongeaient la tête, admiraient avec des ravissements la bonne grâce que monsieur le curé mettait à recevoir les gens les mieux posés de Plassans.
— Allez, madame, disait la cuisinière, on voit bien tout de suite que c’est un homme distingué… Tenez, le voilà qui salue le sous-préfet. Moi, j’aime mieux monsieur le curé, quoique le sous-préfet soit un joli homme… Pourquoi donc n’allez-vous pas dans le jardin ? Si j’étais à votre place, je mettrais une robe de soie, et j’irais. Vous êtes sa mère, après tout.
Mais la vieille paysanne haussait les épaules.
— Il n’a pas honte de moi, répondait-elle ; mais j’aurais peur de le gêner… J’aime mieux le regarder d’ici. Ça me fait davantage de plaisir.
— Ah ! je comprends ça. Vous devez être bien fière !… Ce n’est pas comme monsieur Mouret, qui avait cloué la porte pour que personne n’entrât. Jamais une visite, pas un dîner à faire, le jardin vide à donner peur le soir. Nous vivions en loups. Il est vrai que monsieur Mouret n’aurait pas su recevoir ; il avait une mine, quand il venait quelqu’un, par hasard… Je vous demande un peu s’il ne devrait pas prendre exemple sur monsieur le curé. Au lieu de m’enfermer, je descendrais au jardin, je m’amuserais avec les autres ; je tiendrais mon rang, enfin… Non, il est là-haut, caché comme s’il craignait qu’on lui donnât la gale… À propos, voulez-vous que nous montions voir ce qu’il fait, là-haut ?
Un mardi, elles montèrent. Ce jour-là, les deux sociétés