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Page:Emile Zola - La Conquête de Plassans.djvu/369

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LA CONQUÊTE DE PLASSANS.

inventa des histoires, pendant que, sans l’écouter, elle achevait de mettre son chapeau.

— Si vous croyez que vous la ferez céder ! dit Rose, qui finissait paisiblement son morceau de fromage ; elle préférerait passer par la fenêtre. Attelez votre cheval, ça vaudra mieux.

L’oncle, après un court silence, haussa les épaules, s’écriant avec colère :

— Ça m’est égal, en somme ! Qu’elle prenne mal, si elle y tient ! Moi, je voulais éviter un accident… Va comme je te pousse. Il n’arrivera jamais que ce qui doit arriver, je vais vous conduire.

Il fallut porter Marthe dans la carriole ; une grosse fièvre la secouait. L’oncle lui jeta un vieux manteau sur les épaules. Il fit entendre un léger claquement de langue, et l’on partit.

— Moi, dit-il, ça ne me fait pas de peine d’aller ce soir à Plassans ; au contraire !… On s’amuse, à Plassans.

Il était environ dix heures, le ciel, chargé de pluie, avait une lueur rousse qui éclairait faiblement le chemin. Tout le long de la route, Macquart se pencha, regardant dans les fossés, derrière les haies. Rose lui ayant demandé ce qu’il cherchait, il répondit qu’il était descendu des loups des gorges de la Seille. Il avait retrouvé toute sa belle humeur. À une lieue de Plassans, la pluie se mit à tomber, une pluie d’averse, drue et froide. Alors, l’oncle jura. Rose aurait battu sa maîtresse, qui agonisait sous le manteau. Quand ils arrivèrent enfin, le ciel était redevenu bleu.

— Est-ce que vous allez rue Balande ? demanda Macquart.

— Certainement, dit Rose étonnée.

Il lui expliqua alors que Marthe lui semblait très malade, et qu’il vaudrait peut-être mieux la mener chez sa mère. Il consentit pourtant, après une longue hésitation, à arrêter