Aller au contenu

Page:Emile Zola - La Conquête de Plassans.djvu/37

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

IV


Arrivé au second étage, Mouret était plus ému qu’un écolier qui va entrer pour la première fois dans la chambre d’une femme. La satisfaction inespérée d’un désir longtemps contenu, l’espoir de voir des choses tout à fait extraordinaires, lui coupaient la respiration. Cependant, l’abbé Faujas, cachant la clef entre ses gros doigts, l’avait glissée dans la serrure, sans qu’on entendît le bruit du fer. La porte tourna comme sur des gonds de velours. L’abbé, reculant, invita silencieusement Mouret à entrer.

Les rideaux de coton pendus aux deux fenêtres étaient si épais, que la chambre avait une pâleur crayeuse, un demi-jour de cellule murée. Cette chambre était immense, haute de plafond, avec un papier déteint et propre, d’un jaune effacé. Mouret se hasarda, marchant à petits pas sur le carreau, net comme une glace, dont il lui semblait sentir le froid sous la semelle de ses souliers. Il tourna sournoisement les yeux, examina le lit de fer, sans rideaux, aux draps si bien tendus qu’on eût dit un banc de pierre blanche posé dans un coin. La commode, perdue à l’autre bout de la