— Dites à Rougon que je compte aussi sur lui et sur vous. Ce n’est pas parce que la vieille mère est là, à côté, que ça doit vous empêcher de venir ; alors, il n’y aurait plus moyen de se distraire… Je vous dis qu’elle va bien, qu’on la soigne bien. Vous pouvez vous fier à moi… Vous goûterez d’un petit vin que j’ai trouvé sur un coteau de la Seille ; un petit vin qui vous grise, vous verrez !
Tout en parlant, il se dirigeait vers la porte. Félicité le suivait de si près, qu’elle semblait le pousser dehors. Tout le monde l’accompagna jusqu’à la rue. Il détachait son cheval, dont il avait noué les guides à une persienne, lorsque l’abbé Faujas, qui rentrait, passa au milieu du groupe, avec un léger salut. On eût dit une ombre noire filant sans bruit. Félicité se tourna lestement, le poursuivit du regard jusque dans l’escalier, n’ayant pas eu le temps de le dévisager. Macquart, muet de surprise, hochait la tête, murmurant :
— Comment, mon garçon, tu loges des curés chez toi, maintenant ? Et il a un singulier œil, cet homme. Prends garde : les soutanes, ça porte malheur !
Il s’assit sur le banc de la carriole, sifflant doucement, et descendit la rue Balande, au petit trot de son cheval. Son dos rond, avec sa casquette de fourrure, disparurent au coude de la rue Taravelle. Quand Mouret se retourna, il entendit sa belle-mère qui disait à Marthe :
— J’aimerais mieux que ce fût toi, pour que l’invitation parût moins solennelle. Si tu trouvais moyen de lui en parler, tu me ferais plaisir.
Elle se tut, se sentant surprise. Enfin, après avoir embrassé Désirée avec effusion, elle partit, jetant un dernier coup d’œil, pour s’assurer que Macquart n’allait pas revenir, derrière elle, bavarder sur son compte.
— Tu sais que je te défends absolument de te mêler des affaires de ta mère, dit Mouret à sa femme, en rentrant ; elle est toujours dans un tas d’histoires où personne ne voit