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Page:Emile Zola - La Conquête de Plassans.djvu/97

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LA CONQUÊTE DE PLASSANS.

Toute sa curiosité de bourgeois inoccupé s’était calmée dans le souci des parties de la soirée ; il n’épiait plus l’abbé, disant que maintenant il le connaissait bien, qu’il le tenait pour un brave homme.

— Eh ! laissez-moi donc tranquille ! criait-il à ceux qui attaquaient l’abbé Faujas devant lui. Vous faites un tas d’histoires, vous allez chercher midi à quatorze heures, lorsqu’il est si aisé d’expliquer les choses simplement… Que diable ! je le sais sur le bout du doigt. Il me fait l’amitié de venir passer toutes ses soirées avec nous… Ah ! ce n’est pas un homme qui se prodigue, je comprends qu’on lui en veuille et qu’on l’accuse de fierté.

Mouret jouissait d’être le seul dans Plassans qui pût se vanter de connaître l’abbé Faujas ; il abusait même un peu de cet avantage. Chaque fois qu’il rencontrait madame Rougon, il triomphait, il lui donnait à entendre qu’il lui avait volé son invité. Celle-ci se contentait de sourire finement. Avec ses intimes, Mouret poussait les confidences plus loin : il murmurait que ces diables de prêtres ne peuvent rien faire de la même façon que les autres hommes ; il racontait alors des petits détails, la façon dont l’abbé buvait, dont il parlait aux femmes, dont il tenait les genoux écartés sans jamais croiser les jambes ; légères anecdotes où il mettait son effarement inquiet de libre penseur en face de cette mystérieuse soutane tombant jusqu’aux talons de son hôte.

Les soirées se succédant, on était arrivé aux premiers jours de février. Dans leur tête-à-tête, il semblait que l’abbé Faujas évitât soigneusement de causer religion avec Marthe. Elle lui avait dit une fois, presque gaiement :

— Non, monsieur l’abbé, je ne suis pas dévote, je ne vais pas souvent à l’église… Que voulez-vous ? À Marseille, j’étais toujours très-occupée ; maintenant, j’ai la paresse de sortir. Puis, je dois vous l’avouer, je n’ai pas été élevée